Dans le cadre du projet d’acquisition d’un bien immobilier appartenant à une société dont M. X… était le gérant, M. Y… a remis à l’ordre de ce dernier un chèque d’un montant de 15 244 euros tiré sur le compte joint qu’il partageait avec Mme Z… S’étant vu opposer le rejet du chèque en raison d’une opposition pour perte, M. X… a assigné ces derniers aux fins de voir déclarer l’opposition illégale et obtenir, notamment, le paiement du chèque. M. Y… et Mme Z… s’y sont opposés et ont demandé au tribunal de constater le défaut de validité du chèque qui ne comportait ni date ni lieu de sa création. La demande de M. X… est rejetée par les juges du fond. Il forme alors un pourvoi dans lequel il invoque, en particulier, la règle selon laquelle nul ne peut se prévaloir de sa propre faute pour échapper à ses engagements. Il considère que M. Y… s’était sciemment abstenu de renseigner le lieu et la date de sa signature sur le chèque litigieux, qu’il ne contestait pas avoir tiré sur son compte joint. Il aurait ainsi commis une faute intentionnelle dont il ne pouvait se prévaloir pour faire échec au transfert irrévocable de la propriété de la provision qu’emporte la remise d’un chèque et se dégager de son engagement.
Le pourvoi est logiquement rejeté. Il n’était pas possible de faire produire les effets légaux du chèque – à savoir le transfert de propriété de la provision au profi t du bénéfi ciaire – si le titre n’avait pas valeur de chèque, faute de comporter toutes les mentions obligatoires, telles qu’imposées par l’article L. 131-2 du code monétaire et fi nancier. La faute du tireur ne pouvait bien évidemment avoir pour effet de « racheter » le chèque irrégulier. Le titre incomplet n’ayant pas valeur de chèque, il ne pouvait, en vertu du phénomène dit de la conversion par réduction, avoir de valeur juridique que sur le terrain du droit commun et, conformément à la jurisprudence, être ravalé au rang de simple commencement de preuve par écrit d’une reconnaissance de dette du souscripteur envers le bénéficiaire.
Tel est le raisonnement de la Cour de cassation, qui se résume en une simple phrase : « la cour d’appel n’a fait que tirer les conséquences qui s’évinçaient de l’absence des mentions exigées par l’article L. 131-2 du code monétaire et financier, dont il résultait que le chèque ne valait plus que comme commencement de preuve de la créance invoquée par le bénéficiaire contre le tireur, ces conséquences étant indépendantes de la faute imputée au tireur ».