L’octroi de dommages-intérêts sur le fondement de l’article 266 du code civil est subordonné à la caractérisation de conséquences d’une particulière gravité subies par l’un des époux du fait du divorce.
Le montant de la prestation compensatoire doit être chiffré par la décision qui la fixe.
En l’espèce, pour condamner l’époux aux torts duquel le divorce a été prononcé à payer à sa conjointe une somme de 15 000 € à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l’article 266 du code civil, les juges d’appel s’étaient fondés sur le choc consécutif à l’abandon soudain par l’époux du domicile conjugal puis à l’annonce de l’engagement d’une procédure de divorce, choc auquel s’est ajouté un fort sentiment d’humiliation de l’épouse, dû à l’infidélité de son conjoint, mais aussi sur le fait que l’épouse, salariée et membre du directoire de la société dont son mari était directeur, avait été éconduite au profit d’une collaboratrice de celui-ci et dépossédée progressivement de ses fonctions au sein de la société.
Cette motivation est censurée par la première chambre civile, qui a considéré que les éléments relevés par les juges d’appel étaient impropres à caractériser les conséquences d’une particulière gravité subies par l’épouse du fait de la dissolution du mariage. Le préjudice réparé en application de l’article 266 du code civil doit en effet résulter de la dissolution du mariage et non trouver sa source dans les manquements commis par l’époux fautif en cours d’union qui ont justifié le prononcé du divorce à ses torts exclusifs. S’agissant, par ailleurs, de la question de la fixation de la prestation compensatoire, l’arrêt d’appel avait condamné l’époux le plus fortuné à verser à sa conjointe une prestation compensatoire de 200 000 € et, à titre complémentaire, un immeuble lui appartenant en propre qui avait constitué le domicile conjugal. La censure de cet arrêt sur ce point est fondée sur les articles 270 et 274 du code civil desquels il ressort que le montant de la prestation compensatoire qui prend la forme d’une attribution de biens en propriété doit être précisé dans la décision qui la fixe. En effet, l’article 270 précité exige que la prestation compensatoire prenne la forme d’un capital dont le montant est fixé par le juge, l’abandon d’un bien de l’époux débiteur au profit du créancier n’étant qu’une des modalités d’exécution de la prestation compensatoire en capital prévues par l’article 274, ceci au même titre que le versement d’une somme d’argent.
S’agissant, enfin, des modalités d’exécution de la prestation compensatoire, la haute juridiction rappelle le caractère subsidiaire de l’abandon de biens prévu par le 2° de l’article 274 du code civil. Elle censure ainsi les juges d’appel pour avoir ordonné l’attribution du bien considéré sans avoir constaté que le versement d’une somme d’argent, assorti le cas échéant de la constitution de garanties, n’était pas suffisant pour assurer le paiement effectif de la prestation compensatoire.