En présence d’une machine complexe, le procès-verbal de réception ne peut suffire à rapporter la preuve de l’exécution de l’obligation de délivrance.
En principe l’acheteur reconnaît par le procès-verbal de réception que le bien est conforme à celui qu’il a commandé, ce qui permet au vendeur de prouver l’accomplissement de son obligation de délivrance. À la différence des vices cachés, l’action pour défaut de conformité porte sur les défauts apparents de la chose lors de la réception. Si elle n’apparaît pas conforme à l’acheteur, il lui appartient de manifester des réserves ou de refuser la marchandise.
La question en l’espèce se posait d’une machine de tournage fraisage haute technologie qui n’avait pas permis à la société acquéreur de fabriquer les pièces d’une précision conforme à celle à laquelle la société vendeuse s’était engagée. La société vendeuse, à l’origine du pourvoi, estimait que le procès-verbal de réception paralysait la demande de résolution de la vente et que les juges du fond auraient dû rechercher si le dysfonctionnement ne résultait pas en réalité d’un vice caché. La chambre commerciale rejette cette argumentation en précisant les limites attachées au procès-verbal de réception signé par l’acheteur.
Elle estime que la conformité de la chose aux stipulations contractuelles ne peut s’apprécier par la seule mise en route de la machine. En revanche, il est nécessaire que la mise au point de la machine soit effective ; or, en l’espèce, cela avait été prévu par le contrat, mais n’avait jamais eu lieu. Elle ajoute que, s’agissant de matériels très sophistiqués, le procès-verbal de réception ne peut suffire à rapporter la preuve de l’exécution de l’obligation de délivrance. Dès lors, ce n’était pas un problème de vice caché mais véritablement celui d’une délivrance de la chose puisque la machine n’avait pu être utilisée conformément à ce qui avait été prévu par les parties. La résolution de la vente et, par voie de conséquence, la résiliation du contrat de crédit-bail, devenu sans objet, étaient pleinement justifiées.
Par ailleurs, sur les effets de la résiliation du crédit-bail, la chambre commerciale était saisie d’un pourvoi incident du crédit-bailleur. La résiliation du crédit-bail n’ayant d’effet que pour l’avenir, la cour d’appel avait, à juste titre, considéré que le crédit-bailleur n’avait pas à rembourser les loyers perçus par le crédit-preneur.
Toutefois, elle estimait que la restitution du prix par le vendeur au crédit-bailleur du fait de la résolution de la vente devait être réduite du montant des loyers perçus du crédit-preneur. Cette solution revenait à procurer au vendeur une indemnité ou un avantage non prévu par la loi. En effet, la résolution de la vente entraîne l’obligation de restituer pour le vendeur le prix perçu. Qu’il s’agisse de l’action pour vice caché ou en défaut de conformité, la Cour de cassation considère que le vendeur n’a droit à aucune indemnité due, le cas échéant, à l’utilisation du bien ou à l’occupation de l’immeuble.