Lorsque le contrat de mission est requalifié en contrat à durée indéterminée, le salarié a droit à une indemnité spécifique de requalification, alors même que la relation de travail s’est poursuivie en contrat à durée indéterminée.
Par le présent arrêt, la Cour confirme sa position au sujet de l’indemnité de requalification en cas de contrats de mission successifs : lorsqu’il requalifie en contrat à durée indéterminée une succession de missions d’intérim, le juge doit accorder au salarié une seule indemnité de requalification dont le montant ne peut être inférieur à un mois de salaire. La Cour était venue préciser que la « requalification de plusieurs contrats de mission en relation contractuelle à durée indéterminée n’entraîne le versement d’indemnités qu’au titre de la rupture du contrat à durée indéterminée. Ainsi, quel que soit le nombre de contrats de mission conclus, la requalification est applicable à l’ensemble de ceux-ci et non pas à chaque contrat irrégulier. Par conséquent, en cas de rupture du contrat, le salarié ne peut prétendre qu’à une seule indemnité de requalification dont le montant ne peut être inférieur à un mois de salaire ».
Poursuivant dans cette lignée et confirmant sa position antérieure, la chambre sociale avait par la suite décidé que, « même lorsqu’elle fait l’objet d’une interruption pendant plusieurs mois, la succession de contrats de mission avec le même salarié qui est requalifiée en contrat à durée indéterminée ne peut donner lieu qu’à une indemnité unique de requalification, de préavis, et pour rupture abusive ». Encore très récemment, la Cour de cassation a confirmé sa jurisprudence au sujet d’un salarié intérimaire qui réclamait la requalification en trois contrats de travail à durée indéterminée pour des contrats de mission espacés de plusieurs mois, jugeant que le salarié ne pouvait prétendre qu’à une seule indemnité de requalification et une seule indemnisation pour rupture abusive.
En l’espèce, un salarié avait été mis à disposition à compter du 1er juin 1999 dans le cadre de contrats de mission successifs motivés par un accroissement temporaire d’activité pour occuper divers postes d’opérateurs de production, d’opérateur atelier et d’agent d’usinage. Le 26 août 2002, il est engagé par l’entreprise utilisatrice en qualité d’opérateur de montage par contrat de travail à durée indéterminée. Licencié pour inaptitude le 26 août 2007, le salarié saisit la juridiction prud’homale afin d’obtenir le versement de diverses sommes, dont l’indemnité de requalification. La cour d’appel le déboute de cette dernière demande au motif que les relations contractuelles s’étaient poursuivies sans aucune interruption dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée. Par conséquent, cette indemnité n’avait pas à lui être versée. Dans un second moyen de cassation, le salarié développe l’argumentation selon laquelle la circonstance que le contrat de travail à durée déterminée ait été poursuivi après l’échéance du terme ou que les parties aient conclu un contrat à durée indéterminée, ne prive pas le salarié du droit de demander la requalification du contrat à durée déterminée initial et d’obtenir le versement de l’indemnité spéciale de requalification.
Aux visas des articles L. 1251-40 et L. 1251-41 du code du travail, la Cour de cassation rappelle d’abord que « lorsqu’une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d’une entreprise de travail temporaire en méconnaissance des dispositions des articles L. 1251-5 à L. 1251-7,
L. 1251-10 à L. 1251-12, L. 1251-30 et L. 1251-35 du code du travail, ce salarié peut faire valoir auprès de celle-ci les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission ».
S’appuyant sur sa jurisprudence, la Cour précise ensuite que « la circonstance que la relation de travail [a] été poursuivie après la fin de la mission ou que les parties [ont] conclu un contrat à durée indéterminée ne prive pas le salarié de l’indemnité spéciale de requalification qui ne peut être inférieure à un mois de salaire prévue par l’article L. 1251-41 du code du travail ».
L’entreprise utilisatrice sera ainsi condamnée à verser cette indemnité de requalification au salarié concerné même si la relation de travail s’est poursuivie dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée.