Le testament partiellement pré-rédigé peut être valable Les neveux d’un testateur ont assigné le légataire universel en annulation de l’acte l’instituant en cette qualité, au motif que le testament par acte public n’est valablement reçu qu’à condition de remplir certaines exigences de formes, et ce, sous peine de nullité (C. civ., art. 1001). Les neveux invoquent la violation de deux formalités substantielles : l’obligation que le testament soit dicté par le testateur (C. civ., art. 972) et la nécessité que l’acte énonce le lieu d’établissement du notaire qui le reçoit et la date (Décr. n° 71-941, 26 nov. 1971, art. 6). Ils assignent le légataire universel en annulation de l’acte l’instituant en cette qualité et face au refus qui leur a été signifié par la cour d’appel dans un arrêt confirmatif, ils forment un pourvoi. Il est tout d’abord contesté que l’indication du lieu et de la date à laquelle le testament a été passé puisse être valablement réalisée en fin d’acte par un simple renvoi à une mention figurant ailleurs dans le document. En l’espèce, ce renvoi était réalisé par la mention « aux lieu et date indiqués en tête des présentes ». Toutefois, la Cour de cassation rejette cet argument en soulignant que le renvoi à une autre partie du testament est suffisant pour établir la date et le lieu de rédaction du testament. Le second argument avancé par le pourvoi au soutien de la nullité du testament est la pré-rédaction de celui-ci. Le pourvoi soutenait qu’il y avait nécessairement eu violation de l’article 972 du Code civil dès lors que le testateur n’avait pas entièrement dicté l’acte contenant ses volontés et que les témoins n’avaient assisté qu’à une partie seulement de la rédaction. De manière très pragmatique, la Cour de cassation rejette ce raisonnement en relevant que c’est « la partie testamentaire proprement dite qui doit être dictée par le testateur en présence constante des témoins ». Une telle prérédaction est donc valable dès lors qu’elle ne concerne pas l’objet même de l’acte.

Frais d’entretien : pas de rapport à la succession
Les frais d’entretien sont dispensés de rapport en application de l’article 852 du Code civil (V. Rép. civ., v° Rapport des dons et legs, n° 49, par Guével), telle est la règle traditionnelle que nous rappelle un arrêt de rejet rendu par la Cour de cassation le 1er février 2012. Au-delà du simple rappel de la règle, le présent arrêt met en évidence les conditions nécessaires à la dispense de rapport. Il rappelle que les sommes versées doivent s’apprécier au regard des revenus du disposant, peu importe qu’elles constituent la plus grande partie de revenus du donataire et qu’elles soient susceptibles de représenter une part importante de l’actif successoral. De plus, se rangeant derrière le pouvoir souverain des juges du fond, la Cour de cassation énonce que les sommes litigieuses constituent des frais d’entretien représentant l’expression d’un devoir familial sans pour autant entraîner un appauvrissement significatif du disposant. Autrement dit, d’une part, le devoir familial caractérise l’absence de véritable intention libérale et, d’autre part, par une lecture a contrario de l’arrêt, il semble que la Cour de cassation nous livre une nouvelle exception à la dispense de rapport en nous invitant à nous placer du côté de l’appauvrissement du patrimoine successoral pour déterminer le principe du rapport. Si les frais d’entretien ne sont jamais rapportables, sauf stipulation contraire, ils ne le sont donc pas plus lorsqu’ils n’entraînent pas un appauvrissement significatif du disposant. Rompant avec la dispense générale de rapport, la Cour de cassation, qui n’est pas restée insensible à certaines critiques opère dans le présent arrêt une distinction entre les frais d’entretien courant dont la dispense de rapport n’est pas contestée et les frais qui s’avèrent très importants. Ceux qui sont susceptibles d’entraîner un appauvrissement significatif du disposant n’échappent pas au rapport.

Pas de nullité du testament en cas de disparition de sa cause
Un père avait décidé, par voie testamentaire, de rétablir l’égalité entre ses deux enfants, égalité qui avait été rompue, à l’époque de la rédaction du testament, par une série de donations consenties à l’une de ses deux filles sans que l’autre n’ait été gratifiée. Cette égalité avait cependant été rétablie par la suite, et du vivant du testateur, par une série de donations préciputaires, consenties cette fois par les
grands-parents – les père et mère du testateur – à celle des deux filles qui n’avait rien reçu. La nullité du testament était poursuivie de ce chef, l’héritière qui n’en bénéficiait pas soutenant que la disparition de la cause de la libéralité devait en emporter l’anéantissement. Les juges du fond l’acceptèrent, retenant que la disparition du motif déterminant du legs privait ce dernier de cause et entraînait sa nullité. La Cour de cassation censure ce raisonnement au visa de l’article 1131 du Code civil, au motif qu’il appartient exclusivement au testateur, capable, de  de tirer les conséquences de la disparition prétendue de la cause qui l’a déterminé à disposer.